Le blog littéraire de Renaud Meyer

Les belles oeuvres sont filles de leur forme, qui naît avant elles. Paul Valéry

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De la nécessité des prix littéraires

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article_goncourtMaintenant qu’ils ont tous été décernés, on peut en parler avec distance et discernement, avant de les oublier complètement et se dire d’ici quelques années « c’est vrai que machin a eu le Renaudot ».

Que dire des lauréats ? Rien, si ce n’est que les prévisions que je m’étais amusé à faire fin septembre, ici-même, n’étaient pas très éloignées de la réalité qui s’est dessinée début novembre. Marie Ndiaye a bien reçu le Goncourt, son outsider Guenassia le Goncourt des Lycéens, Ovaldé, bonne prétendante du Renaudot a obtenu le Renaudot des lycéens, Beigbeder a osé le Flore pour Liberati, Gwenaëlle Aubry a bien eu le Femina et Yannick Haenel l’Interallié comme prévu, il y a quelques semaines.

La vraie question qui concerne les prix est non pas l’attendu des résultats, mais la conséquence objective de leur obtention au-delà de la jubilation certaine pour le lauréat. Car soit le prix est là pour lancer un livre et en doper les ventes, soit il est là pour récompenser un talent. Dans les deux cas, le public ne doit pas être passé par là avant le jury, faute pour le jury d’être redondant et donc inopérant. Et c’est bien là le problème. Car, sauf exception, les lauréats en question étaient déjà sur la liste des meilleures ventes avant d’obtenir leur prix.

On se plait ainsi à rêver à de vraies surprises, de vrais prix et à un monde littéraire moins parfait, moins prévisible, plus audacieux dans ses choix, emporté par une nouvelle vague qui tarde à venir et que l’édition repousse inlassablement.

Written by Renaud Meyer

novembre 14, 2009 at 5:09

La question de Candide

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Pourquoi Marie NDiaye, prix Fémina, entrée au répertoire de la Comédie-Française, dont le dernier roman est parmi les dix meilleures ventes de livres et qui de surcroît vit à Berlin reçoit-elle une aide à l’écriture de 50 000 euros du Centre National du Livre pour se consacrer pleinement à un grand projet d’écriture ?

Written by Renaud Meyer

septembre 17, 2009 at 8:20

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La rentrée des écrivains

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754_3300Les écrivains sont finalement des élèves bien sages, dressés à l’ancienne par des éditeurs soucieux du rythme des saisons et de la rigueur inculquée par les anciens. Septembre doit demeurer septembre, un éditeur doit y présenter ses meilleurs poulains et un écrivain qui se respecte ne doit pas se tourner les pouces lorsque sonne la cloche. D’ailleurs, à cet instant précis, le bon élève doit avoir déjà remis sa copie au professeur.

En cette rentrée, on retrouve étrangement les mêmes têtes, les mêmes titres, comme ailleurs les gommes ont une odeur retrouvée et les récrés résonnent des mêmes cris. Ça rassure tout le monde. Le lecteur, l’éditeur, le libraire. On sait qui mettre en pile, qui acheter, qui élire meilleur élève début novembre pour le tableau d’excellence.

Et dans la cour, car l’écrivain qui veut réussir se doit de fréquenter davantage la cour que la classe, on distingue cet étrange phénomène de bandes et d’âmes errantes portant leur solitude comme une marque de leur originalité.

Bandes d’ambianceurs qui se serrent les coudes et brandissent avec négligence leurs devoirs de vacances comme un passe-temps qui les dépasse. Ils y parlent de l’époque, de la nuit, de la drogue et des femmes. Tous copains de virées, jeunes, riches, intelligents et désœuvrés. Frédéric Beigbeder, Simon Liberati, comme en d’autres saisons Floriant Zeller.

Sous d’autres platanes, on croise les transfuges qui gagneront la première place en changeant discrètement d’éditeur. Cette année ce sera Marie NDiaye qui quitte Minuit pour Gallimard.

Plus loin, ces élèves doués dont la rigueur métronomique nous gratifie d’un roman de cent pages en septembre de chaque année. Première des ventes encore une fois, Amélie et son « Voyage d’hiver », son meilleur roman depuis cinq ans, dit-on un peu partout dans la cour. C’est qu’ils ont, ces écrivains de la cour des grands, un étrange don d’ubiquité qui leur permet de faire parler d’eux, ici et ailleurs en même temps, sur France 2, France 5 et Canal Plus dans la même soirée.

Quant aux petits qui se sont frayé une place dans cette cour-là, on les remarque tout de suite. Véronique Ovaldé qui réussit cette année à se mettre au premier rang sans avoir à pousser des coudes. Jean-Michel Guenassia, premier roman, dont le « club des incorrigibles optimistes » a déjà fait le tour de l’école parce qu’il ne parle ni de drogue chez les riches, ni de guerre en Irak, ni de suicides dans le Nord de la France par temps pluvieux.

Il y a bien sûr tous les autres – près de six cents -, studieux, ombres qui passent, un stylo à la main et l’espoir au fond du cœur.

C’est finalement curieux cette façon toute française de faire de la littérature, avec ses devoirs et ses bons élèves toujours prêts à parader en une cour automnale, galvanisés par la note, le hochet, le paraître.

Septembre demeure septembre, avec ses habitudes recouvrées, ses étés indiens et ses entêtements sans importance.